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L’ENVERS DU DÉCOR

  • Photo du rédacteur: ThroughKimysEyes
    ThroughKimysEyes
  • 25 nov. 2018
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 26 nov. 2018


En juillet 2008, l'administration pénitentiaire camerounaise faisait état d’environs 3500 détenus pour 800 places à la prison de New Bell située à Douala capitale économique du Cameroun.

Les conditions de détention dans les prisons ainsi que dans les commissariats sont en général très mauvaises. Dans ces derniers, des témoignages reportent qu’il arrive qu’une vingtaine de personnes soient détenues dans une seule petite cellule, sans lumière ou installation sanitaire autre qu'une cuvette servant de toilettes. Les détenus n’ont pas suffisamment d'eau et malgré que la loi prévoie qu'ils doivent être présentés au parquet dans les 48 heures qui suivent leur arrestation, en pratique bien des personnes soupçonnées d'infractions restent retenues illégalement pendant quelques semaines, sans voir avocats ou familles, surtout s’ils ne peuvent se faire libérer en soudoyant certains responsables. Après avoir été placés en détention provisoire, les suspects sont transférés dans une prison où ils risquent d'être détenus plusieurs années avant que leur affaire ne soit jugée.

Plus de la moitié des détenus de la prison de New Bell seraient des prévenus. Un grand nombre d'entre eux attendent leur procès pendant des années, celui-ci constamment reporté car les tribunaux sont surchargés de travail, ou encore que les prisonniers n'ont pas d'avocat. La plupart n'ont pas les moyens de payer un avocat et ceux commis d'office sont, souvent mal payés et n’ont donc aucune motivation à défendre leur client.

C’est avec des mots tel que : corruption, hygiène inexistante et surpopulation que le portrait de cette prison est dessiné. Pour exemple, rendez-vous compte que la prison n’offre qu’un repas par jour.


Depuis petite j’entends des choses effroyables ici et là au sujet de cette prison qui se divise en deux quartiers bien distincts : ceux qui ont les moyens ou qui y sont incarcérés pour raisons politiques et les autres. De hautes personnalités sont dans le quartier VIP du pénitencier, au sein duquel, il est possible de bénéficier de certains avantages.

La vie dans la prison y est quelque peu moins épouvantable. Cependant, ces VIP attisent la jalousie des plus démunis et leur vie est par conséquent sans cesse mise en danger. S’ils veulent pouvoir sortir de leur quartier sécurisé, ils doivent alors traverser toute la grande cour, notamment le tristement célèbre « carrefour Ndokoti ». Un couloir où ces hautes personnalités croisent les détenus les plus dangereux. VIP ou non, chacun y risque sa vie.

J’ai eu l’occasion d’interviewer durant une dizaine de minutes une personne actuellement en détention dans cette prison. Pour des raisons de sécurité, un pseudonyme a été donné.


K : Comment est la prison d’un état général ?

A.P : Cette prison n’est rien d’autre qu’un enfer sur terre. C’est comme la poubelle d’Hysacam. Il faut y faire un tour pour en savoir quelque chose. Les cellules puent et la nourriture est presque non comestible. Nous mangeons une fois par jour cette nourriture qu’on ne peut même pas donner aux animaux.


K : Combien êtes-vous dans ta cellule ?

A.P : Nous sommes tellement nombreux. il y'a tellement de prisonniers que certains doivent rester debout ou dans la cour principale.


K : Comment sont ces cellules ?

A.P : A votre arrivée, on vous demande si vous avez les moyens de payer un frais de location de cellule. Je ne savais pas qu’on louait même en prison. La location me dépassait déjà a l’extérieur, alors en prison je n’avais toujours pas les moyens de payer pour dormir sous un toit. Mais le camerounais est comme il est et il fait son commerce partout. Ceux qui ont les moyens payent 10 000 F à 15 000 F, voire plus et ils vont dans les cellules en étages. Eux, ils ont au moins droit au ventilateur qu’on peut leur apporter de la maison ou des téléviseurs pour les plus aisés. Nous qui n’avons pas les moyens, on nous demande de verser une somme autour de 3 000 F à 5 000 F pour être dans la jungle (traduisez ici, cellule de 6 personnes maximum mais au final, ils sont plus de 15 personnes par cellules). Dans ces cellules surpeuplées, tu dois encore verser quelque chose aux chefs, souvent un prisonnier permanent là-bas, avant d’avoir droit à un tout petit espace pour s’asseoir ou s’allonger. Les nouveaux venus qui n’ont pas d’argent doivent rester debout.


K : Quels sont les rapports entre détenus et gardiens ?

A.P : Comme dans tout rapport de domination, les dominants exercent une violence à l’encontre des dominés. Si nous n’avons pas les moyens pour se faire un minimum respecter, alors nous sommes traités comme des chiens des rues.


K : L’argent circule beaucoup dans la prison?

A.P : C’est le marché la bas. Le plus grand commerce de Douala y a lieu. C’est même plus fluide que les marchés Centrale et Sandaga réunis. Certains prisonniers font leur commerce, d’autres deviennent les employés des plus aisés et réalisent toutes leurs corvées. L’argent est partagé entre les tout-puissants prisonniers et certains gardiens de la prison. Pour venir te visiter, ta personne doit donner de l’argent aux gardiens pour se voir accorder quelques minutes de visite. Ceux qui ont les moyens et à qui la famille apporte chaque jour des repas, payent au quotidien les gardiens. Tous les jours, les responsables amassent des billets.


K : Qu’as-tu au repas habituellement ?

A.P : Le régime alimentaire est essentiellement composé de riz et de pain, avec très peu de viande, de poisson ou de légumes. Certains prisonniers peuvent compléter l'ordinaire de la prison avec des suppléments apportés par leur famille. Beaucoup meurent de faim car l’apport nutritif est trop faible pour un adulte.


K : Pourquoi es-tu là-bas et pour combien de temps ?

A.P : J’ai été arrêté pour vol en bande organisée. Je venais d’avoir un enfant, je n’arrivais même pas à acheter de quoi le nourrir ou le protéger des moustiques. C’est beaucoup de pression dans une vie, ne pas pouvoir protéger sa famille et la mettre à l’aise.


K : Pourquoi certains sont autorisés à sortir en journée et revenir dans la prison la nuit ?

A.P : Tout dépend du motif de l’emprisonnement. Aussi d’autres peuvent payer les gardes pour sortir voir leur familles en journée et revenir dormir en prison le soir. Certains gardes laissent aussi sortir ceux qui font les braquages, ils vont faire un coup et partager le butin avec eux.


K : Dans cette prison quelle est la chose qui te choque le plus ?

A.P : Les malades, ce sont les gens malades de tuberculose ou autre maladies contagieuses, ils sont mélangés avec les autres prisonniers et ne reçoivent parfois aucun soins. Le gouvernement laisse ces gens mourir à petit feu. Aussi, les cas d'indisciplines sont punis de coups de fouet, ou de privation de nourriture. La drogue circule facilement et les prisonniers s'en servent pour surmonter la misère de cette prison.


K : Avec un tel parcours, comment envisages-tu l’avenir ?

A.P : Pour ma sortie définitive, je prie de ne plus jamais avoir à frôler les murs de la prison de New Bell. J’ai une formation de mécanicien, j’espère trouver un travail. C’est la galère du dehors qui pousse aux problèmes.


Pour résumer, passer par la prison de New Bell, que l’on soit coupable ou innocent, laisse toujours des traces. Etre détenu, c'est se sentir inutile. Vous ne travaillez pas, vous n'aidez pas votre famille, vous ne servez à rien à la société. Si vous mourez, le monde ne s'en rendra même pas compte. Vous savez qu'il continu de tourner, mais vous n'en faites plus partie.




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